Les conflits collectifs

Exemples de conflits et de négociations

Une organisation, qu’elle soit une entreprise, une association ou une organisation publique (y compris un État), vise des objectifs. Pour les atteindre, ses dirigeants et ses cadres adoptent des stratégies. Mais il arrive que les intérêts des différentes parties prenantes soient contradictoires. D’où des conflits liés aux choix stratégiques.

Pour les éviter, chacun doit jouer à l’équilibriste en usant de diplomatie, le but étant de trouver un consensus, c’est-à-dire un état sur lequel chacun tombe d’accord. Mais parfois, une stratégie consiste aussi… à ne pas les éviter !

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Qu’est-ce qu’un conflit ?

Un conflit est un « processus qui prend forme lorsqu’une partie perçoit qu’une autre partie vient d’affecter négativement, ou s’apprête à effectuer négativement une chose à laquelle elle tient » (S. Robbins et T. Judge, Comportements organisationnels, Pearson, 2006).

Ce processus peut survenir entre quelques personnes (voir la page sur les conflits interpersonnels). Les pires conflits sont les guerres mais elles ne font l’objet de ce site ! À un niveau intermédiaire, on trouve les oppositions à la politique intérieure d’un État, aux décisions d’actionnaires, entre directions d’une même entreprise ou encore entre clients et fournisseurs.

On pense fréquemment qu’un conflit doit absolument être évité. Mais on peut objecter que c’est un évènement incontournable de la vie en société (d’ailleurs tous les animaux sociaux en connaissent) et même que les conflits peuvent s’avérer nécessaires, à l’instar du stress.

 

Un peu d’histoire

Cette problématique existe depuis toujours. Nous pourrions multiplier les exemples historiques mais vous trouveriez cela hors sujet et vous entreriez en conflit avec ce site web. Donc, pour ne pas laisser votre désaccord s’installer, nous nous limiterons à un seul exemple. Il suffira pour mettre le sujet en perspective, c’est-à-dire pour montrer que cette problématique n’est pas propre aux entreprises d’aujourd’hui.

Depuis l’Antiquité, la stratégie des souverains n’était guidée que par leur ambition personnelle (d’accord, ça arrive encore). Toutefois, le sens de l’État s’est peu à peu affirmé (en Europe, vers la fin du Moyen Âge si l’on excepte certaines périodes de la Grèce antique). On peut alors parler de stratégie au service de la nation. Les moyens ont souvent été une expansion territoriale ou à but économique : comptoirs, colonies.

En France, c’est le roi Louis XI qui a mis en œuvre une stratégie de renforcement de l’État. Celle-ci s’est appuyée sur deux axes. Le premier a été l’affaiblissement de la haute noblesse dont la puissance avait jusqu’alors empêché les souverains de faire prévaloir l’intérêt général sur des intérêts particuliers. D’une certaine manière, la mort du duc de Bourgogne Charles de Téméraire marqua en France la fin du Moyen Âge politique. L’autre axe a été le développement économique, source de revenus pour l’État.

    La chute des princes et la fin des guerres intérieures ont ramené la paix et la prospérité. Un chiffre le montre : en 1460, la taille, le principal impôt du royaume, rapportait 1 200 000 livres ; à la mort de Louis, en 1483, elle en rapporte 3 900 000. Le souverain a certes accru la pression fiscale, mais, avant tout, ses sujets se sont enrichis. Louis XI s’intéresse en effet aux problèmes économiques. Il fait venir des Italiens pour créer une industrie de la soie, des Allemands pour relancer les mines, il fonde à Lyon de grandes foires (…). L’administration royale, confiée à des hommes sûrs, atteint une efficacité nouvelle, surtout dans le domaine des postes, le roi jugeant la rapidité des communications essentielle à sa diplomatie. (Histoire du monde, le Moyen Âge, dir. G. Duby, Larousse).

Louis XI

 

Exemples plus récents

Dans les pays démocratiques, les nœuds de conflit ne prennent plus la forme de milliers de morts sur les champs de bataille mais se traduisent régulièrement par des grèves, du moins lorsqu’une stratégie se heurte aux intérêts des salariés ou des fonctionnaires.

Les exemples sont innombrables. L’un des conflits sociaux les plus durs de l’Histoire fut la grève des mineurs britanniques, commencée en mars 1984. Elle dura un an.

L’objectif du premier ministre, Margaret Thatcher, était d’abord économique : fermer les puits déficitaires. Il était aussi idéologique : amoindrir la puissance des syndicats. Le conflit était donc anticipé puisque tout autre scénario était inenvisageable. Avant l’annonce des fermetures, des mesures législatives et économiques (importation et constitution de stocks de charbon) furent prises en prévision des mouvements sociaux. Le conflit fut violent, long et difficile. Le Gouvernement britannique en sorti vainqueur.

Ci-dessous, manifestation en 1973 (H. Cartier-Bresson, musée Carnavalet).

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Le climat social est la mesure du degré de satisfaction qui prévaut dans une organisation. Bien qu'il existe des indicateurs chiffrés (voir les pages sur le suivi des relations sociales et le suivi des conflits collectifs), cette mesure est difficile à établir de façon fine.

Des conflits existent aussi entre dirigeants et actionnaires d’une même entreprise.

Ainsi, en février 2020, la directrice générale d’Engie (groupe industriel énergétique) a été évincée lors d’un conseil d’administration extraordinaire. L’une des raisons du conflit qui opposait Isabelle Kocher aux actionnaires était d’ordre stratégique : la dirigeante avait orienté son groupe vers une transition écologique trop rapide, négligeant certaines activités rentables mais fondées sur les énergies fossiles (Engie étant leader européen sur le gaz naturel).

 

Consensus et négociations

D’ordinaire, il est salutaire d’éviter les oppositions frontales. Si des dirigeants décident de licencier ou de baisser les salaires pour des raisons budgétaires, ils peuvent être amenés à gérer une grève qui coûtera bien davantage que l’économie espérée. Les négociations sont le moyen le plus sûr d’obtenir un consensus.

En France, il existe une obligation légale de négocier au niveau des branches professionnelles et en entreprise, dès lors qu’il y a au moins un délégué syndical.

En-dehors de ce cadre légal, les négociations sur le lieu de travail existent entre toutes les parties prenantes : entre collègues, entre un vendeur et un client, entre un manageur et ses collaborateurs, etc.

Certaines sont récurrentes et font la une des journaux, notamment lorsqu’elles concernent les traitements dans la fonction publique ou les négociations tripartites de l’agroalimentaire (agriculteurs, industriels et distributeurs), moment où les grandes enseignes de supermarchés sont accusées de dicter leur loi.

    Comme à l’accoutumée, les agriculteurs ont accusé les supermarchés de tirer les prix à la baisse, alors que ces derniers ont dénoncé les hausses de tarifs demandées par les agro-industriels (laiteries, biscuiteries, salaisons, producteurs de conserves ou de plats préparés…). Lesquels, jugés peu transparents sur les marges, ont critiqué à leur tour les distributeurs. (Europe 1, 02/03/2021).

Les négociations peuvent être classées selon deux types de finalité : distributive et intégrative. Une négociation est appelée distributive si une partie gagne ce que l’autre perd (marchandage, par exemple). Elle est intégrative si toutes les parties sont finalement gagnantes. Il est évident qu’un consensus est plus facilement atteignable dans ce second cas de figure. La distinction reste toutefois théorique : il est difficile de juger si une négociation salariale à l’avantage des salariés se traduira par une meilleure motivation de ces derniers et ainsi par une meilleure efficacité !

Les techniques de négociation sont enseignées aux professionnels (acheteurs et vendeurs, syndicalistes et DRH…).

Lorsque chacun reste sur ses positions et que la négociation n'avance plus, ou tout simplement quand les parties refusent de négocier entre elles, il est possible de recourir à l'arbitrage par une tierce personne.

 

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