L'approche POEM

Canaux publicitaires

Assailli de publicités, le consommateur ne sait plus où donner de la tête. Si cela peut vous rassurer, ça peut aussi être le bazar chez les annonceurs. Aussi doivent-ils structurer leurs stratégies médiatiques. C’est ici qu’intervient l’approche POEM (Paid, Owned, Earned Media), grille de lecture devenue incontournable dans le paysage publicitaire d’aujourd’hui.

Popularisé dans les années 2000, ce modèle permet de classifier les différents types de canaux de communication commerciale selon leur mode d’acquisition, leur portée et leur niveau de contrôle. Il offre une vision intégrée qui favorise la complémentarité des actions de communication.

 

Présentation

1. Paid Media (médias payants)

Le Paid Media est tout simplement la publicité payée. Il s’agit des espaces achetés par l’annonceur pour diffuser ses messages.

  • La publicité télévisée et à la radio.

  • Les bannières web.

  • Le display programmatique. C’est une méthode automatisée d’achat et de vente d’espaces publicitaires sur Internet, principalement sous forme de bannières, vidéos, ou formats interactifs. Elle repose sur des algorithmes, de l’IA et surtout des enchères en temps réel. Lorsqu’un internaute visite un site, une enchère automatique est lancée en quelques millisecondes auprès des annonceurs intéressés par son profil. La publicité de celui qui a misé plus haut que les autres s’affiche immédiatement sur l’écran.

  • Le SEA (Search Engine Advertising, comme Google Ads). Ce sont les publicités qui apparaissent sur les moteurs de recherche en fonction des mots clés saisis.

  • Les publicités sur les médias sociaux (Facebook Ads, Instagram Ads, TikTok Ads…).

L’objectif principal ici est de générer de la visibilité rapidement. C’est le moyen le plus direct (et le plus coûteux) de faire passer un message.

Les avantages sont le contrôle du message et du timing, des effets immédiats et mesurables ainsi que la scalabilité (on peut augmenter la portée en augmentant le budget).

Les inconvénients sont le coût élevé, surtout sur les canaux très sollicités, une durée de vie limitée (dès qu'on arrête de payer, la visibilité chute), et une confiance relativement faible du public qui voit bien qu’il s’agit de publicité !

Exemple : une marque de vêtements lance une nouvelle collection été. Elle lance une campagne avec des bannières sur des sites de mode, une pub ciblée sur Instagram et un spot de 20 secondes diffusé avant les vidéos YouTube.

2. Owned Media (médias possédés)

On désigne par Owned Media tous les canaux de communication possédés et contrôlés par la marque, c'est-à-dire ses propres espaces : site web, blog, newsletters, comptes sur les médias sociaux, brochures, packaging...

L’objectif ici est de construire une relation durable avec le public en créant du contenu pertinent, en incarnant l’identité de marque et en fidélisant.

Les avantages sont un coût faible à moyen (une fois le canal créé, on n’a plus besoin de payer pour chaque diffusion), un contrôle total du message et la pérennité (les contenus restent disponibles et peuvent être mis à jour).

Les inconvénients sont un temps relativement long pour construire une audience et une notoriété, une portée non immédiate (sauf si couplé à du paid) et une exigence de contenu solide, ce qui demande du temps.

Exemple : une marque de cosmétiques publie des articles sur un blog avec des interviews d’experts, diffuse des tutoriels maquillage et envoie une newsletter mensuelle à ses abonnées.

3. Earned Media (médias conquis ou "gagnés")

Les retombées gratuites et spontanées générées par des tiers sont appelées earned media. Ce sont :

  • Les mentions dans la presse.

  • Les partages sur les réseaux sociaux et le bouche-à-oreille.

  • Les avis clients.

  • Les recommandations d’influenceurs (non payés).

L’enjeu est ici de gagner en crédibilité grâce à l’adhésion du public ou des relais d’opinion.

Les avantages sont la crédibilité puisqu’un contenu recommandé est perçu comme plus authentique, un effet viral possible, avec une forte portée et un coût qui peut être faible (mais pas toujours !).

Les inconvénients sont l’absence de contrôle du message et le risque d’image puisqu’une mauvaise critique peut aussi devenir virale. De plus, obtenir de l’earned media nécessite souvent une stratégie de relations avec la presse et de l’engagement communautaire (fidéliser une communauté en répondant aux commentaires, en créant des contenus qui suscitent des réactions, en repartageant les publications des clients, etc.).

Exemple concret : une cliente enthousiaste poste une vidéo TikTok vantant les mérites d’un shampoing. La vidéo fait 500 000 vues et déclenche un pic de commandes alors que la marque n’a rien payé.

Certains ont ajouté une quatrième catégorie, le shared media, d’où le modèle PESO (Paid, Earned, Shared, Owned). Le Shared correspond aux contenus co-construits ou co-diffusés (par exemple des partenariats ou les publications relayées sur les réseaux sociaux).

 

Complémentarité

POEM n’est pas un choix exclusif. Au contraire, la richesse de ce modèle réside dans l’hybridation des leviers.

Prenons un exemple :

  • Une entreprise lance une vidéo de marque sur YouTube (owned).

  • Elle booste cette vidéo avec une campagne sponsorisée (paid).

  • Des internautes la partagent massivement et des journalistes en parlent (earned).

C’est l’effet domino : l’investissement initial (paid) amplifie les canaux possédés (owned), ce qui déclenche des retombées naturelles (earned).

 

Stratégie

Comment bâtir une stratégie POEM efficace ?

D’abord en définissant ses objectifs.

  • Notoriété ? Focus sur Paid + Earned.

  • Engagement ? Plutôt Owned + Shared.

  • Conversion ? Ce sera Paid + Owned.

Ensuite en identifiant son audience. On ne s’adresse pas de la même manière à un jeune actif sur TikTok qu’à un cadre sur LinkedIn. Chaque canal a ses codes.

En outre, il est judicieux d’équilibrer les investissements. Il est tentant de tout miser sur le paid pour obtenir des résultats rapides. Mais sans owned solide, on perd la fidélité et sans earned, on manque de résonance sociale.

Enfin, la campagne publicitaire doit être mesurée et éventuellement ajustée. Chaque média a ses indicateurs : CPM (coût pour mille impressions), CPC (coût par clic), taux d’engagement, trafic organique, etc. Il est crucial de piloter avec des données, sans se laisser aveugler par les vanity metrics (nombre de likes ou de vues sans impact réel, par exemple).

 

Limites

  • Les frontières entre paid, owned et earned sont parfois floues. Où classer un influenceur payé (paid) qui devient ambassadeur organique (earned) via ses propres réseaux (owned) ?.

  • Un modèle centré sur les canaux, pas sur l’expérience. L’important n’est pas le canal, mais la cohérence du message tout au long du parcours client.

  • Enfin, le paysage médiatique évolue vite, bouleversant en quelques années les catégories.

 

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