Les mesures du stress

Modèles et mesures du stress

L’évaluation du niveau de stress au travail est avant tout qualitative. Elle est le fruit d’un dialogue avec un médecin qui estime d’une part les caractéristiques des éléments stressants (nature, intensité, durée…) et d’autre part la capacité du patient à y faire face. Cependant, des questionnaires ont été développés et perfectionnés, tant par des médecins que par des psychologues. Certains visent à mesurer un niveau de stress, d’autres la capacité à y faire face ou encore la possibilité que l'état d'un individu devienne pathologique. Ils sont utilisés par des intervenants en entreprise puisqu’un excès de stress se traduit par des problèmes de santé et de comportement, donc in fine par des coûts (voir page conséquences du stress).

Avant d’aborder les systèmes de mesure, il n’est pas inutile de rappeler le modèle général qui a initié la graduation du niveau de stress ainsi que d'autres modèles qui servent aujourd’hui de référence.

 

Hans Selye, le pionnier

Dans les années 1920, le docteur Hans Selye fut le premier à définir la notion de stress. Il établit un modèle en trois phases : une réaction d’alarme où l’on mobilise ses ressources (notamment neuro-endoctriniennes), une phase de résistance où on les utilise puis une phase d’épuisement de l’organisme au cours de laquelle peuvent surgir des problèmes de santé.

H. Selye reconnut également deux formes de stress, l’une positive et l’autre négative. Le bon stress permet de s’adapter rapidement à une situation, voire à se surpasser. Mais il devient pathologique lorsque surviennent des désordres psychologiques ou physiologiques.

Le stress positif nous permet d’avancer dans la vie. C’est pourquoi l’absence totale de stress est non seulement un but inaccessible, mais elle est surtout non souhaitable.

Le modèle de Selye n’est pas en soi un système de mesure mais il le légitime. Nous retiendrons trois états : l’hypostress représente un manque de stimulation et donc de réaction, à l’inverse de l’hyperstress qui annihile les facultés. Entre les deux se trouve le stress optimal. Ces états peuvent être décomposés en niveaux plus fins, ce qui permet d’estimer si un individu risque de basculer dans une forme aiguë de stress.

stressée

 

Les modèles de Karasek et de Siegrist

En 1979, le sociologue et psychologue américain Robert Karasek a publié un questionnaire visant à mesurer le niveau de stress au travail. Il en existe une version française.

Les réponses aux 26 questions du test se présentent sous forme d’échelles non comparatives. Elles permettent de se situer sur trois axes : la demande psychologique, la latitude décisionnelle et le soutien social sur le lieu de travail.

La demande psychologique concerne la charge de travail, sa rapidité d’exécution, sa complexité, son morcellement et le niveau de concentration requis. La latitude décisionnelle englobe la marge de manœuvre et les compétences. On appelle job strain (tension au travail) une situation de forte demande qui ne peut être « compensée » par une latitude décisionnelle suffisante (typiquement, le travail à la chaîne).

Le soutien social est lui-même appréhendé selon deux dimensions : émotionnel et professionnel d’une part, par les collègues et par la hiérarchie d’autre part. L’isostrain est une situation de job strain aggravée par un faible soutien social. Exemple de quatre items (parmi huit) relatifs au soutien social :

soutien social

La mesure du stress subi est donc plus élaborée que celle de H. Selye. Ce questionnaire est particulièrement utilisé aujourd’hui, parfois complété par celui de Siegrist.

Le modèle de Johannes Siegrist repose sur l’équilibre entre les efforts fournis et les récompenses obtenues. Son questionnaire permet donc de mesurer un éventuel surinvestissement dans le travail (c’est-à-dire trop d’efforts mal récompensés). Il a un bon pouvoir prédictif sur la santé physique et mentale. Il existe deux versions du questionnaire, l’une courte (23 items) et l’autre longue (46 items). Pour en savoir plus :

http://www.atousante.com/risques-professionnels/sante-mentale/stress-professionnel/mesure-desequilibre-efforts-recompenses-questionnaire-siegrist/

 

Les mesures

1- La mesure physiologique

La quantité de cortisol dans le sang augmente en réaction à une situation de stress (le cortisol est une hormone secrétée par la glande surrénale). Théoriquement, une prise de sang permet donc de déterminer un niveau de stress chez un individu. D’autres instruments déterminent le taux de cortisol à partir de la salive.

Le stressomètre est un instrument qui mesure le tremblement nerveux au repos. Mais attention, des facteurs exogènes peuvent contribuer au tremblement : caféine, tabac, médicaments…

2- La mesure psychologique

On distinguera l’échelle de Holmes-Rahe et les questionnaires qui réclament une évaluation de la part de l’individu.

L’échelle de Holmes-Rahe date de 1967. Elle est construite sur 43 items concernant les évènements de la vie privée et professionnelle qui pour la plupart ne sont pas des jugements de valeur. À chacun d’eux est associé un nombre de points. En additionnant ceux-ci, on obtient un niveau de risque de rencontrer prochainement des problèmes de santé.

Malgré sa longévité, la portée de cette échelle doit être relativisée. Par exemple, le critère le plus stressant est la mort du conjoint (100 points). Mais une mort tragique ou un décès après une longue maladie n’engendrent pas des stress identiques ; par ailleurs l’attachement au conjoint est plus ou moins intense selon les couples… La façon dont les évènements sont vécus étant propre à chaque individu, le résultat global du test s’inscrit fort logiquement dans une large fourchette de probabilités.

L’échelle de points a été élaborée et testée aux États-Unis dans les années 60. Elle serait beaucoup moins valide aujourd’hui en Europe. Certes, elle a souvent été adaptée, tant aux populations qu’aux époques. Mais en raison de cette forte réserve, nous ne la reprenons pas ici (vous en trouverez facilement plusieurs versions sur le web).

Les questionnaires qui réclament une évaluation sont particulièrement variés. Ils comportent des questions fermées (faites-vous régulièrement des déplacements professionnels de plus de 24 heures ? oui/non) ou des échelles (en raison de la charge de travail, vous arrive-t-il de sauter un repas ? jamais, rarement, régulièrement, fréquemment). On remarque sur ces exemples qu’il existe une part de subjectivité (« souvent », « régulièrement »…).

Pour réaliser un autodiagnostic, le choix est large. Exemples :

http://www.solutions-anti-stress-au-travail.com/Mesurer-le-stress.html

http://www.positif-stress.fr/test-de-stress/

Des ouvrages reprennent de nombreux questionnaires qui permettent d’évaluer soi-même les multiples facteurs de stress auxquels on peut être soumis. Par exemple, « Stress et burnout au travail » d’Élisabeth Grebot (Eyrolles 2008) en contient une belle batterie : conflit entre les rôles sociaux, degré de plaisir ou de souffrance au travail, tendance à l’anxiété, stabilité émotionnelle, réactions au stress, etc. L’ouvrage contient aussi un questionnaire pour évaluer un stress post-traumatique (suite à un hold-up, à une catastrophe naturelle…).

 

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