L'injection

Applications injectives

Étymologiquement, injecter quelque chose, c’est mettre à l’intérieur. Au début du vingtième siècle, ce terme a été importé du domaine médical pour être injecté dans celui des maths. En l’occurrence, un ensemble de départ est injecté dans un ensemble d’arrivée. L’étude de l’injectivité est aujourd’hui enseignée au début des études supérieures, du moins dans les cursus où les mathématiques tiennent une place relativement importante. Mais il fut une époque où l’injectivité faisait partie du programme de seconde !

 

Application injective

Une application est injective si tout élément de l’ensemble d’arrivée admet au plus un antécédent. Dit autrement, deux éléments distincts de l’ensemble de départ ont deux images distinctes. Donc, quels que soient \(x\) et \(x’,\) éléments de l’ensemble de départ, et \(f\) une application…

\(x \ne x' \Rightarrow f(x) \ne f(x')\)

Il est d’ailleurs équivalent d’écrire \(f(x) = f(x') \Rightarrow x = x'.\)

On peut aussi dire que \(\forall x' \in B,\) (\(B\) état l'ensemble d'arrivée) il existe au plus un \(x \in A\) (\(A\) étant l'ensemble de départ) tel que \(x' = f(x).\)

En utilisant cette définition, on prouve qu’une application est injective en partant de l’égalité des images \(f(x)\) et \(f(x’)\) puis en montrant qu’elles ne peuvent provenir que d’antécédents égaux (patientez jusqu’à l’exercice 2 ci-dessous pour en avoir une illustration).

Une présentation sous forme de diagramme sagittal devrait opportunément éclaircir le concept :

diagramme sagittal

 

Exemples

La fonction exponentielle est injective sur \(\mathbb{R}\) puisqu’à chaque valeur de \(x\) est associée une valeur \(y.\) Notez que des valeurs \(y\) de l’ensemble d’arrivée n’ont pas d’antécédent (les valeurs négatives). Vous pouvez faire le lien avec le diagramme ci-dessus où l’ensemble d’arrivée contient des valeurs qui ne sont pas les images d’éléments de l’ensemble de départ. Une fonction affine est injective. Elle est même bijective (c’est-à-dire injective ET surjective).

En revanche, sur \(\mathbb{R},\) la fonction carré définie par \(f(x) = x^2\) n'est pas injective puisque, hormis 0, une même image a toujours deux antécédents. On peut montrer qu’une application n’est pas injective en prouvant qu’il existe au moins deux éléments de l’ensemble de départ qui possèdent la même image. En l’occurrence, \(2^2 = (-2)^2 = 4.\)

D’une façon générale, une fonction paire n’a aucune chance d’être injective (la pauvre). En revanche, une fonction impaire peut l’être mais ce n’est pas systématique. À titre d’exemple, la fonction sinus est impaire mais elle n’a rien d’une injection (Cf. sa courbe représentative qui zigzague).

 

Composées de fonctions

Si \(f \circ g\) est injective, alors \(g\) est injective.

La composée de deux fonctions injectives est injective.

 

Exercice 1

La fonction valeur absolue est-elle injective ?

exercice

Réponse : la question est volontairement imprécise. La réponse est non sur \(\mathbb{R}\) dans \(\mathbb{R}.\) Par exemple, \(|2| = |-2|,\) donc \(f(2) = f(-2).\) En revanche, si l’on restreint l’ensemble de définition, elle peut l’être : c’est une injection de \(\mathbb{R}_-\) dans \(\mathbb{R}\) et également de \(\mathbb{R}_+\) dans \(\mathbb{R}.\)

 

Exercice 2

Soit une fonction homographique \(f\) définie sur \(D = \mathbb{R} \backslash \{-\frac{d}{c}\}\) :

\[f(x) = \frac{ax + b}{cx + d}\]

Est-elle injective de \(D\) dans \(\mathbb{R}\) ?

Réponse : supposons que \(f(x_1) = f(x_2).\) On a alors :

\(\frac{ax_1 + b}{cx_1 + d} = \frac{ax_2 + b}{cx_2 + d}\)
\(⇔ (ax_1 + b)(cx_2 + d)\) \(= (ax_2 + b)(cx_1 + d)\)

Distribuons

\(⇔ acx_1ax_2 + adx_1 + bcx_2 + bd\) \(= acx_1x_2 + adx_2 + bcx_1 + bd\)
\(⇔ adx_1 + bcx_2 = adx_2 + bcx_1\)
\(⇔ adx_1 - bcx_1 = adx_2 - bcx_2\)
\(⇔ x_1(ad - bc) = x_2(ad - bc)\)
\(⇔ x_1 = x_2\)

Donc \(f\) est bien une injection de \(D\) dans \(\mathbb{R}.\)

 

Exercice 3

Soit \(f\) la fonction définie sur \(\mathbb{R}\) par \(f(x) = x^3 + 3x - 5.\) Est-elle injective ?

Réponse : certes, elle l’est, et voici pourquoi…

Supposons que \(f(x_1) = f(x_2)\)

\(x_1^3 + 3x_1 - 5 = x_2^3 + 3x_2 - 5\)
\(⇔ (x_1^3 - x_2^3) + 3(x_1 - x_2) = 0\)

Souvenons-nous de l’identité remarquable \(a^3 - b^3\) \(= (a - b)(a^2 + ab + b^2)\)

\((x_1 - x_2)(x_1^2 + x_1x_2 + x_2^2) + 3(x_1 - x_2) = 0\)

Factorisons par \((x_1 - x_2)\)

\((x_1 - x_2)(x_1^2 + x_1x_2 + x_2^2 + 3) = 0\)

Or, le second terme est positif. Pour s’en convaincre, il s’écrit aussi…

\(x_1^2 + x_1x_2 + x_2^2 + 3\) \(= (x_1 + \frac{x_2}{2})^2 + \frac{3b^2}{4} + 3\)

Conclusion, aucune autre issue possible pour résoudre l’équation : \(x_1\) est bel et bien égal à \(x_2.\)

 

Pour aller plus loin

Voir la page rang et noyau.

 

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